Tout le monde savait
Valérie Bacot
« Un jour, il m’aurait tuée. »
Tout le monde savait.
Tout le monde se doutait.
Beaucoup de gens avaient leur petite idée de ce qui pouvait m’arriver dans l’intimité du foyer. Les coups, la violence banalisée, les humiliations quotidiennes…
Tous les invariables de cette vie qui n’en est pas vraiment une.
Un jour, pour qu’il ne nous tue pas, je l’ai tué.
Depuis cette nuit-là, celle du 13 mars 2016, le sommeil ne m’a plus jamais trouvée.
Je pense à mon procès. Ces cinq jours devant la cour d’assises de Chalon-sur-Saône, au cours desquels la société va me demander de raconter mon histoire. C’est encore un combat entre lui et moi. Est-il possible qu’on me comprenne? Vais-je être écoutée ou entendue? Est-il encore capable de me faire du mal, de m’envoyer finir ma vie en prison?
Dès l’âge de douze ans, Valérie Bacot connaît la peur et l’emprise auprès de Daniel, son beau-père, son violeur, puis son mari et proxénète.
Elle raconte ici sa vérité, celle de la tyrannie quotidienne et de l’abandon.
Valérie Bacot est une femme détruite et dévastée non seulement par le manque d’amour maternel, les viols, les coups, le dénigrement, la prostitution, mais aussi et surtout par l’indifférence et l’omerta de la société.
Nous ne pouvons pas imaginer les souffrances qu’elle a connues.
Ses avocates se sont battues pour faire passer un message à la société.
Les violences extrêmes subies par Valérie l’ont transformée en marionnette téléguidée devenue, contre sa volonté, l’objet de son mari pervers.
Il surveillait tout, décidait de tout. Tout le temps, partout, comme une ombre dont elle ne peut jamais se défaire.
Posséder son corps ne lui suffit pas, il veut contrôler son esprit.
Il éprouvait du plaisir à l’humilier.
Elle avait peur pour sa vie, qu’il tenait entre ses mains.
Valérie savait que parler, c’était trop risqué, pour elle, il n’y avait pas d’issue.
Elle reste avec ses interrogations.
Pourquoi sa mère a laissé Daniel la violer durant toute son enfance?
Pourquoi n’a t-elle jamais rien dit, alors qu’elle savait?
Pourquoi le laisser s’installer à la maison à son retour de prison alors qu’il avait été condamné par la justice pour ce qu’il lui avait fait?
Peut-être qu’il n’existe pas de réponses à toutes les questions.
Valérie voulait simplement protéger sa vie, et celle de ses enfants.
Tant de gens ont préféré fermer les yeux, parce que c’était plus confortable pour eux - quitte à les abandonner à leur sort, elle et les enfants.
Par lâcheté, par faiblesse ou par indifférence, c’est plus facile de faire comme si on ne voyait rien.
« L’emprise, c’est une dépossession de soi-même. »
Après le procès, elle espère pouvoir tourner définitivement une page sombre de sa vie.
Edité par Fayard, 12 mai 2021 @Fayard
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